fr

Claude Moniquet : Essayons d'être forts face à un Iran qui semble être fort, mais qui en fait est très faible

Par Claude Moniquet

Claude Moniquet, ancien journaliste, ancien agent de terrain à la DGSE, a travaillé sur le Moyen-Orient et le Bloc de l'Est et c'est à ces deux titres qu'il s'est intéressé depuis 40 ans sur la situation en Iran et ce qu'on appelle l'Arc chiite : l'Irak, la Syrie ou le Liban. Il est l'auteur d'une vingtaine de livres. Il est co-directeur de l'European Stratégic Intelligence And Security Center (EISISC)

Claude Moniquet est intervenu le 26 avril dernier à une conférence au Press Club de Bruxelles, à l'initiative de l'EISISC, sur la situation iranienne après plusieurs mois d'une crise qui la plus grave que son régime a connu depuis sa naissance en 1979. Voici la transcription de son intervention.

Je vais vous parler de deux choses aujourd'hui, d'une part de la diplomatie des otages et d'autre part de la question de l'inscription des gardiens de la Révolution sur la liste des organisations terroristes européennes.


D'abord, la diplomatie des otages c'est un terme qui est apparu assez récemment dans les médias et essentiellement autour de l'affaire bien connue en Belgique d'Olivier Vandecasteele. Je vais y revenir dans quelques instants. Et on pourra avoir l'impression que c'est une pratique nouvelle de l'État iranien. Absolument pas. Si vous vous en rappelez, un des actes de naissance de la révolution islamique iranienne, c'est la prise d'otage de l'ambassade américaine. Plus de 50 diplomates retenus comme otages pendant 450 jours par des gens qui aujourd'hui, pour la plupart, se trouvent dans les hautes sphères du régime, qu'ils soient au Parlement, au gouvernement, dans les services de sécurité ou dans le renseignement.

Deuxième expérience d'otages, qui a duré encore plus longtemps que ces 450 jours de prise d'otages des diplomates américains, c'est la question, qu'on a appelé les otages du Liban. Les otages du Liban, c'est une séquence qui va durer de 1984 à peu près à 1992, dans lequel plusieurs dizaines de journalistes et d'humanitaires et d'intervenants divers, européens et américains vont être retenus en otage au Liban par des organisations de paravent, comme le Hezbollah ou le djihad islamique, qui en fait étaient des émanations des gardiens de la révolution dont je parlerai un peu plus tard.

Donc, il n'y a rien de nouveau dans l'utilisation des otages par l'Iran pour faire avancer ses buts politiques et pour faire pression sur ses partenaires, pour avoir une monnaie d'échange. A l'époque de l'ambassade américaine, le guide de la révolution, Khomeini, disait « Oui, mais ce n'est pas nous, ce n'est pas l'État. » Ça se passait en plein centre de Téhéran avec des gens qui s'étaient baptisés les « Étudiants révolutionnaires suivant la ligne de l'imam ». La police ou l'armée iranienne auraient pu y mettre fin en quelques minutes. Ils ne l'ont jamais fait pendant 450 jours, mais ce n'était pas la faute de l'État iranien. C'étaient des militants indépendants sur lesquels l'État n'avait pas de pouvoir. Donc voilà, ce n'est pas nous. Les otages du Liban, même chose. « D'ailleurs, ça ne se passait même pas en Iran, ça se passait au Liban. Et nous, Iraniens, qu'est-ce que vous voulez qu'on ait comme influence sur ces gens qu'on ne connaît pas ? On n'a même pas le numéro de téléphone du Hezbollah ou de l'État islamique. Comment pourrions-nous leur dire d'arrêter ? »

Ce qui a changé, c'est qu'aujourd'hui c'est pleinement assumé. C'est qu'aujourd'hui, en Iran, on arrête des gens sous des prétextes fallacieux. Par exemple, le Français Benjamin Brière a commis un crime inimaginable et qui me scandalise personnellement. Il a filmé une réserve naturelle avec un drone. Filmer une réserve naturelle avec un drone, c'est évidemment une atteinte à la sûreté de l'État ! Il a d'ailleurs été arrêté pour atteinte à la sûreté de l'État et condamné pour espionnage. Je ne sais pas si ça a été dit clairement, mais très probablement au profit de « l'entité sioniste », comme disent les Iraniens quand ils désignent Israël. De même pour toute une série d'otages français, on a six otages français actuellement en Iran. On a Benjamin Brière, Bernard Phélan, qui est un double national franco-irlandais. On a les syndicalistes Cécile Kohler et Jacques Paris. On a la chercheuse Fariba Adelkhah et on a une sixième personne dont l'identité n'a pas été révélée. En tout, il doit y avoir entre 20 et 30, peut-être 40 otages occidentaux qui sont actuellement détenus en Iran, dont certains ont déjà été condamnés, dont d'autres sont détenus sous des statuts assez obscurs et qui sont destinés à servir de monnaie d'échange, de moyens de pression à l'Iran.

Et puis, on a le belge Olivier Vandecasteele et on a un médecin suédois-iranien, Ahmad Reza Jalali, dont on ne parle pas souvent, mais je pense qu'il faut quand même rappeler son nom, qui lui a été condamné à mort et qui a déjà d'ailleurs été transférée à plusieurs reprises, dans l'aile des condamnés à mort de la prison d'Évine. Jalali, qui enseignait entre autres la médecine d'urgence à la VUB à Bruxelles.

Tout ça est assumé. L'Iran capture ces gens, les condamne sous des prétextes qui ne sont même pas fallacieux, qui sont ridicules, et puis entament des négociations. Entre autres, dans le cas de monsieur Vandecasteele, c'est le cas le plus évident, une négociation directe avec la Belgique. Négociation qui tourne autour de monsieur Assadollah Assadi qui est un diplomate iranien qui était en poste à l'ambassade de Vienne, qui était responsable à l'ambassade de Vienne des opérations du VEVAK, le ministère du Renseignement iranien pour l'ensemble de l'Europe et qui a été pris la main dans le sac avec un smoking gun à la main alors qu'il remettait à des agents du ministère qui étaient basés en Belgique. Ils leur remettaient au Luxembourg une bombe qui devait exploser dans la réunion annuelle des Moudjahidine du peuple à Villepinte en 2018.

C'est un procès qui a été extrêmement important, que je connais bien parce que j'ai été expert des parties civiles lors de ce procès à Anvers en 2019/2020. C'est un procès qui est important parce qu'à plusieurs reprises, on a évoqué dans des procès la responsabilité de l'État iranien dans des attentats, entre autres en Allemagne ou en Argentine. Il est arrivé même qu'il y ait des mandats d'arrêt, entre autres contre monsieur Falahian, qui était à l'époque le ministre du renseignement iranien, pour des attentats commis en Europe. Mais c'est la première fois avec l'affaire Assadi qu'on avait dans le box des accusés présent en Europe, un diplomate iranien pris réellement la main dans le sac avec une documentation exceptionnelle. On avait le film de la remise des explosifs aux terroristes, on avait des échanges de mails, on avait des échanges de coup de téléphone, on avait tout. Résultat, condamnation à 20 ans de prison. Et là, quand en fait les Iraniens, ils ont un peu attendu.

J'étais un peu naïf dans ce procès et j'étais de ceux qui pensaient qu' on avait un cas tellement exemplaire que la Belgique, d'une part, et sans doute d'autres pays européens par solidarité, ne pourraient pas faire autrement que de prendre des sanctions diplomatiques contre l'Iran, c'est à dire un minima des expulsions de gens identifiés comme des agents de renseignement.

Tous les services de renseignement européens ont des stocks de gens qui sont identifiés, connus et qu'on peut expulser comme on le fait avec les Russes dans le cadre de la guerre en Ukraine. Ce n'est pas très compliqué, voire peut être même des ruptures diplomatiques. Pourquoi ? Parce que le terroriste Assadi était diplomate en poste à Vienne et parce que les explosifs qui ont été remis par Assadi aux terroristes qui devaient agir à Villepinte, n'ont pu voyager que par la valise diplomatique, aucun autre moyen. Donc on avait quand même un cas de d'école. On n'a rien fait. Il n'y a pas eu de réaction... La réaction européenne que j'attendais n'a pas eu lieu.

Et donc les Iraniens ont tiré la conclusion qu'ils tirent en général sur l'Europe depuis très longtemps, c'est que l'Europe est faible et n'a pas réellement de volonté quand il s'agit de prendre des sanctions diplomatiques. Et donc l'Iran est passé à l'attaque. Et l'Iran, passant à l'attaque, a simplement décidé un jour qu'il lui fallait un Belge en prison. C'est tombé sur le malheureux Olivier Vandecasteele, qui est aujourd'hui détenu, condamné à 40 ou 50 ans de prison, je crois, ou 30 ans de prison, à une centaine de coups de fouet, une horreur absolue.

Un cas humain - dont nous sommes tous bouleversés et nous sommes tous solidaires avec sa famille - mais qui a amené la Belgique, qui n'a pas pris les mesures nécessaires au niveau diplomatique, comme je viens de le souligner, à faire ce qu'il ne faut absolument pas faire avec l'Iran : c'est à dire à céder à la pression. Qu'est-ce qu'on a fait? Le gouvernement a dans la plus grande discrétion conçu un projet de loi, je pèse mes mots, dont on peut dire qu'il a été écrit à Téhéran. Je veux dire s'il a été écrit par des diplomates belges, c'est une honte pour la diplomatie belge : un accord d'échange de prisonniers, de détenus condamnés qui permet, entre autres, par exemple, une fois qu'un détenu condamné rentre dans son pays d'origine, permet son amnistie, sa grâce ou sa libération. Si ça n'a pas été écrit par les Mollahs, ça a été écrit par quelqu'un qui aimait beaucoup les Mollahs ou qui avait une sympathie personnelle pour monsieur Assadi. Donc, on a cédé. Ce projet de loi qui a été introduit in extremis en juillet, juste avant la fin de la session parlementaire, a été malheureusement voté par la majorité de manière assez automatique.

Je ne m'étendrai pas là-dessus. Et depuis, s'il n'y avait pas eu des recours en justice des victimes du projet d'attentat de Villepinte, Assadi serait de retour en Iran et libéré et probablement fêté comme un héros depuis déjà plusieurs mois. Ce n'est pas le cas parce qu'il y a eu des recours et tous ces recours nous ont été amenés devant la Cour constitutionnelle qui a tranché en disant que la Belgique pouvait peut-être faire un échange et remettre monsieur Assadi à Téhéran, mais qu'en tout état de cause, elle devait prévenir les victimes, en l'occurrence les gens des Moudjahidines du Peuple d'Iran et du CNRI, qui pouvaient s'adresser à un tribunal pour introduire un recours. Donc, on a une décision un peu bizarre juridiquement. C'est un peu un serpent qui se mord la queue parce que ce jeu-là peut durer pendant des années. Pour le moment, en tout cas, la Belgique a introduit une demande officielle de libération de monsieur Vandecasteele. On ne sait pas si elle a proposé le retour de monsieur Assadi, mais probablement pas puisque nous n'en avons pas été prévenus.

Donc, comme elle doit prévenir les partis civils, apparemment, ça n'a pas été fait. Cette solution belge était la moins bonne. Elle était la moins bonne pour une raison très simple. D'abord parce que l'Iran des Mollahs est un pays - et son histoire l'a prouvé - qui ne connaît qu'un langage : celui de la force. Quand on s'oppose à l'Iran, l'Iran recule. Quand on est faible devant l'Iran, elle avance et c'est comme ça depuis 40 ans. La deuxième raison, elle est éthique. Évidemment, on ne libère pas un terroriste condamné au début de sa peine. Qu'après un tiers, deux tiers de la peine, il puisse, en fonction des conditions légales, y avoir des négociations, est un autre problème. Mais on ne libère pas quelqu'un qui a été condamné à 20 ans de prison au bout de deux ans de détention ou de trois ans de détention. C'est quand même juridiquement difficile à accepter. Troisièmement, n'importe quel adepte des séries policières télévisées sait que la pire chose à faire, c'est de céder à un maître chanteur. Céder à un maître chanteur, ça n'a jamais fait jusqu'à preuve du contraire, que l'encourager à continuer à pratiquer le chantage.

En clair, si cette affaire Assadi-Vandecasteele aboutit par un échange, la Belgique pense protéger ses citoyens, mais elle les met en danger. Parce que demain ou dans six mois ou dans trois ans, s'il y a un autre contentieux entre la Belgique et l'Iran, il y aura d'autres Belges qui seront enlevés, qui seront condamnés à des dizaines d'années de prison, à une peine de fouet... Et puis la Belgique devra bien à un moment donné céder comme elle l'a fait dans ce cas. Et c'est le cas bien entendu pour les autres pays européens. Voilà pour la diplomatie des otages.

Le cas des Gardiens de la révolution iranienne

Je vais passer aux « Gardiens de la révolution iranienne », qui sont d'ailleurs liés à l'affaire Assadi, puisque ce dernier, avant d'être dans les services de renseignement, a été formé pendant la guerre Iran-Irak dans les Gardiens de la Révolution. C'est là qu'il a appris, entre autres, le sabotage, l'utilisation et la manipulation des explosifs. Les gardiens de la Révolution c'est une organisation qui est très intéressante et je vais me permettre une comparaison qui peut sembler audacieuse et qui peut choquer.

Je ne compare pas le régime iranien au régime nazi, quoiqu'on pourrait philosophiquement faire certaines comparaisons, mais on peut certainement comparer les Gardiens de la Révolution aux SS. Le SS était une organisation idéologique, une armée idéologique du régime d'Adolf Hitler. C'est exactement ce que sont les Gardiens de la Révolution. Les Gardiens de la Révolution ont été créés en mai 79, juste après la révolution, pour être un contrepouvoir par rapport à l'armée officielle, dont la fidélité n'était pas assurée. C'est une armée idéologique. C'est une armée qui a un pouvoir d'arrestations, entre autres, on a les manifestations récentes, de nombreuses arrestations, des centaines probablement, ont été commises par les gardiens de la Révolution. C'est une armée qui gère des lieux de détention. C'est une armée c'est une armée qui a son propre service de renseignements, qui a aussi sa marine, son aviation, etc. C'est une armée qui, à l'intérieur du pays, est la colonne vertébrale du régime. C'est la garde prétorienne du régime des Mollahs, comme les SS étaient la garde prétorienne du régime hitlérien.

À l'extérieur, c'est une force militaire extrêmement puissante, qui a ses propres forces spéciales, qui s'est spécialisée dans la formation, l'encadrement de groupes terroristes. J'ai parlé de Hezbollah, mais il y en a d'autres. C'est une force qu'on a vue en action en Syrie pendant la guerre civile. C'est une force qui est directement liée à la préparation et à la commission d'attentats, non seulement en Europe, mais aussi en Amérique du Sud. L'attentat contre la mutuelle juive AMIA, qui avait fait 85 morts en 1994, a été préparé par des gens officiellement du Hezbollah, mais qui avaient été formés, encadrés par les Gardiens de la Révolution. Ce sont les mêmes Gardiens de la Révolution qui ont fait exploser les baraquements militaires américains et français à Beyrouth en octobre 1983, avec 200 morts américains et une soixantaine de morts français. Ce sont les mêmes qui ont encadré et formé les gens qui, un an plus tard, faisaient exploser l'ambassade américaine à Beyrouth. Ils ont été impliqués dans l'affaire des otages du Liban, comme je l'ai dit, par l'intermédiaire du Hezbollah qu'ils avaient formé et encadré. Et beaucoup plus récemment, on les retrouve dans des projets d'attentats, par exemple contre le bureau de représentation israélien à Bakou en 2011 et contre l'ambassade israélienne à Bangkok en juin 2012.

Donc, c'est une organisation qui est incontestablement une organisation terroriste. C'est aussi une organisation qui est liée au plus haut niveau au régime, puisqu'elle participe au Conseil suprême de sécurité nationale. Le Conseil suprême, c'est une instance extrêmement intéressante parce que j'entends — je suis assez fasciné par ça — depuis des années des diplomates européens, en particulier français, me dire qu'il faut distinguer en Iran, dans le régime, entre les durs et les modérés. C'est un discours que j'ai entendu pendant une partie de ma jeunesse, qui est malheureusement lointaine, sur l'Union soviétique. On disait « Vous savez, il y a des modérés au pouvoir en Union soviétique. » D'ailleurs, un des principaux modérés, c'était un homme qui était connu parce qu'il aimait les disques de jazz qu'il faisait venir par valise diplomatique et le whisky écossais. Il s'appelait Youri Yandropov, c'était le chef du KGB…

Le Conseil suprême de Sécurité nationale est un organe dans lequel siègent tous les représentants de tous les centres de pouvoir iraniens. On y trouve évidemment le président de la République, Raïssi. On y trouve les représentants du Guide suprême. On y trouve l'armée, on y trouve les gardiens de la Révolution, on y trouve aussi le ministère des Affaires étrangères, on y trouve la police et on y trouve même le président du Parlement. Il y a une douzaine de membres permanents. Tous les centres de pouvoir sont réunis et tous participent à la même chose ; parce qu'à quoi sert le Conseil suprême de sécurité nationale iranien ? Il sert à déterminer à quel moment et quels moyens doivent être utilisés pour faire progresser les intérêts du régime des Mollahs. Ça peut être de la pure diplomatie, ça peut être des sanctions commerciales, ça peut être l'utilisation du terrorisme. Nous avions, en 2019, un peu après l'arrestation d'Assad, publié un rapport sur le terrorisme iranien en Europe dans lequel on avait relevé, et c'était loin d'être exhaustif, une trentaine d'actes terroristes commis ou tentés par le régime iranien et entre autres par les Gardiens de la Révolution en Europe, aux États Unis ou en Amérique latine ou au Moyen Orient.

Un signe de faiblesse du régime

Ce que je veux dire, c'est que le régime iranien est par nature un régime terroriste. Ça n'est pas un accident, ça n'est pas un régime qui utilise le terrorisme, c'est un régime qui est terroriste par nature, et les gardiens de la révolution sont un des principaux outils de ce régime terroriste. Dès lors, la question de savoir si des sanctions doivent être prises contre les gardiens n'est pas vraiment une question puisque des sanctions, on en prend. On en a encore pris il y a quelques jours à Bruxelles, aux États Unis et en Grande Bretagne. On a pris de manière coordonnée des sanctions contre des dirigeants des gardiens. Mais à quoi rime le fait de prendre systématiquement des sanctions contre des individus tout en ne sanctionnant pas l'organisation qu'ils représentent, qu'ils dirigent et dont ils sont responsables. Si les dirigeants et les cadres des Gardiens de la Révolution sont des terroristes, ipso facto, l'organisation qu'ils dirigent est une organisation terroriste. Et donc je pense que cette inscription des gardiens sur la liste des organisations terroristes européennes est une nécessité. C'est une nécessité parce qu'il faut, et je reviens à cette idée, il faut envoyer des messages clairs à l'Iran, des messages que l'Iran comprend.

Il a été expliqué de manière tout à fait claire et brillante par mes prédécesseurs que l'Iran, sous son apparence de force, était un État faible aujourd'hui. Et je dirais même, j'irais plus loin, plus l'Iran montre ses muscles, plus c'est une preuve de faiblesse. Parce que quand vous êtes fort et sûr de vous, quand vous dominez votre pays et votre société, vous n'avez pas besoin de faire ce que les Iraniens font. Le régime iranien, en réprimant les manifestations, en pendant des opposants, en organisant des attentats à l'étranger... c'est un signe de faiblesse. Comme est un signe de faiblesse le fait d'avoir nommé le bourreau Ibrahim Raïssi à la tête de la République. C'est un signal qu'on envoie. On dit aux gens dont on sait qu'ils sont en phase de se révolter, qu'ils se sont déjà révoltés dans le passé, faites attention parce que celui qu'on vient de mettre au pouvoir, ce n'est pas un réformiste, c'est un très méchant. En 88, il était impliqué dans cette tuerie horrible dans laquelle 30 000 prisonniers, très majoritairement des Moudjahidine du peuple, ont été assassinés dans les prisons du régime.

Quand on sort cet homme-là de la naphtaline, alors qu'il n'a pas de base politique particulière et qu'on le met à la tête du pouvoir, c'est un signal fort qu'on envoie à la société. Notre tour est venu, je pense, le tour de l'Europe et des démocraties est venu d'envoyer un signal fort au régime iranien et de dire Non, nous avons compris votre jeu et nous ne céderons plus. Et cela ça passe par l'inscription des gardiens des révolutions sur la liste des organisations terroristes. Ça passe par un redimensionnement des missions diplomatiques iraniennes en Europe. Je ne parle pas spécialement de rupture des relations. C'est un stade ultérieur qu'il faudra peut-être un jour atteindre. Mais ramener les ambassades iraniennes, les conseillers iraniens à une dimension plus raisonnable, déjà en expulsant les gardiens, les agents qui font du renseignement et de la subversion et qui sont payés exclusivement pour espionner les communautés iraniennes en Europe. Ce serait un signal que les Iraniens pourraient comprendre. Je vais en terminer par ce point. Essayons d'être forts face à un Iran qui semble être fort, mais qui en fait est très faible.