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Iran : furieux, le régime se venge en attaquant les lycéennes avec du gaz toxique

Par la rédaction

Après cent jours d'attaques au gaz toxique contre des établissements scolaires pour les filles en Iran entraînant l'empoisonnement, l'intoxication et l'hospitalisation des milliers d'écolières et des lycéennes, Ali Khamenei, le Guide suprême de la dictature théocratique, a enfin brisé son silence pour attribuer ces crimes à des mains extérieures à son régime. Cela n'est guère surprenant pour les connaisseurs de la démagogie à tout-va mêlée à la propagande goebbelsienne qui caractérise le vieux solitaire de Téhéran.

"Si vraiment des mains sont derrière cette affaire", a déclaré Ali Khamenei, "il s'agit d'un grand crime intolérable". "Si des individus sont impliqués dans cette affaire", a-t-il répété, "les auteurs et les commanditaires doivent être condamnés à la peine maximale".

Depuis plus de trois mois, une vague sans précédent d'attaques au gaz cible les lycéennes dans plus de la moitié des départements du pays. Deux lycéennes ont perdu la vie lors de ces attaques biologiques, et des milliers d'autres ont été hospitalisées. Le quasi silence et l'inaction des autorités sur ce ciblage des lycéennes ne laisse guère de doutes quant aux intentions qui sous-tendent cette violence, surtout si l'on considère le rôle déterminant joué par ces jeunes filles dans la révolution qui a secoué l'Iran depuis septembre dernier. Bien que le mouvement ait pris une forme moins violente ou visible, tout le monde, y compris les dirigeants du régime, reconnaît qu'il n'a jamais totalement disparu et qu'une étincelle suffirait à rallumer la flamme.

Bien que Khamenei ait tenté de disculper son régime de ces attaques au gaz, il a tout de même reconnu que "l'objectif est de créer un climat de terreur et d'insécurité psychologique dans la société".

À qui profite ce climat de terreur dans les circonstances actuelles, sinon à un régime aux abois qui tente par tous les moyens d'empêcher une reprise de la révolte qui promet d'être bien plus dévastatrice pour le pouvoir que la précédente ? La théocratie a trop souvent joué cette carte de crime de masse commis par elle-même, puis attribué aux autres, dans le but de tromper et détourner l'opinion nationale et internationale des difficultés réelles et crises auxquelles elle est confrontée.Toutefois, selon de nombreux médias occidentaux « un grand nombre de citoyens estiment que le pouvoir est en réalité à l'origine de ces empoisonnements. Et la colère s'allume de nouveau à travers le pays. » (Le Monde)

L'attaque à l'arme chimique contre la ville kurde de Halabcha pendant la guerre Iran-Irak, l'attentat à la bombe contre le mausolée du 8ème Imam des chiites à Machhad (nord-est de l'Iran) en 1994, les attaques en série à l'acide contre les femmes en 2015, l'attaque contre un autre mausolée à Chiraz (sud du pays) en 2022 et des dizaines d'autres exemples, qui se sont tous avérés avoir été ordonnés par le Guide suprême en personne, rappellent que cette méthode est devenue monnaie courante pour Khamenei, sans oublier l'expérience acquise par les forces du régime pendant la guerre en Syrie où celles-ci soutenaient le régime de Damas et où des attaques chimiques de diverses intensité ont été utilisées contre la population civile pour tuer, invalider ou créer un climat de terreur.

La pilule est si difficile à avaler que même la presse autorisée par le pouvoir émet des doutes sur les déclarations selon lesquelles la source des empoisonnements des lycéennes se situerait en dehors du cercle restreint du sommet de la hiérarchie à Téhéran. Cette affaire sans précédente est si grave que l'on peut se permettre de voir des fissures apparaître au sein même du pouvoir.

Ainsi par exemple, « se procurer un gaz toxique est l'affaire de spécialistes et ne pourrait être l'œuvre du simple citoyen. Ceux qui empoisonnent les lycéennes font certainement partie de nos amis ignorants», écrit le journal Arman Meli le 4 mars dernier.

« Quelle que soit l'origine de ces attaques, espérons que la langue du commanditaire et les mains des exécuteurs soient arrachées, même s'ils prétendent obéir à la foi », ajoute le même jour le journal Jomhouri-Eslami, dans une allusion à peine cachée à des mains cachées au sein du pouvoir.

Une idée retenue par des autorités qui veulent faire croire à des crimes commis par des loups solitaires ou au plus des extrémistes religieux organisés. Mais la population est d'avis que la structure la plus extrémiste, la plus fanatique et la mieux organisée en Iran est bien le régime iranien lui-même.

"Les attaques au gaz contre les lycéennes ont provoqué des mouvements de protestation à Téhéran et dans plusieurs autres villes. Durant le week-end, des parents se sont réunis dans certaines villes devant les centres gouvernementaux pour protester contre l'inaction des autorités. Comme d'habitude, les manifestants ont été brutalement pris à partie par les Gardiens de la révolution et des forces de l'ordre habillées en civil. La seule réaction sérieuse des autorités comme le montrent les déclarations des uns et des autres, notamment le numéro un du régime, a été de promettre plus de répression en menaçant les contestataires avec des condamnations à la peine maximale.

« Khamenei est en train de se venger des jeunes filles qui ont joué un rôle déterminant dans les soulèvements de ces derniers mois pour tenter de les intimider », a répliqué Maryam Radjavi lors de son intervention à la Conférence de la Journée mondiale de la femme qui s'est tenue à Bruxelles le 4 mars.

La présidente élue de la Résistance iranienne a souligné que ces tentatives du régime resteront sans effet: « Dans son rôle d'avant-garde, la Femme iranienne soutenue par les hommes à travers l'Iran vaincra le dictateur religieux et contribuera à l'avènement de la démocratie et de l'égalité homme-femme».

« Un soulèvement cent fois plus ravageur que le précédent va bientôt venir », a-t-elle promis.