fr

Où en est le programme nucléaire iranien ? Cinq mois après la guerre de juin 2025

Par Maceo Ouitana*

21 nov 2025

En juin 2025, Israël et le régime iranien se sont livrés à leur affrontement le plus direct depuis des décennies. Douze jours d'une guerre d'une intensité inédite au Moyen-Orient, marqués par des échanges de frappes de missiles, des attaques de drones et des cyber-offensives visant les infrastructures stratégiques des deux pays.

Si le conflit s'est achevé sans victoire claire, il a profondément modifié l'équilibre de la dissuasion régionale. Pour la première fois, les États-Unis ont directement participé à des opérations offensives contre deux sites iraniens, Natanz et Fordow, considérés comme les cœurs du programme nucléaire du pays.

Le 28 juin, des images satellites du centre Natanz, publiées par l'Institut pour la science et la sécurité internationale (ISIS), ont révélé d'importantes destructions : les bâtiments abritant les centrifugeuses IR-9 et IR-6 ont été soufflés, tandis que les structures de confinement souterrain montraient des traces d'explosion interne. Fordow, situé près de Qom, a subi des frappes ciblées sur son système de ventilation et ses tunnels d'accès, rendant le site inopérant pour plusieurs mois.

Depuis, Téhéran observe un mutisme calculé. Le régime se borne à évoquer des « dégâts limités » et promet la « poursuite du programme pacifique », sans publier de données techniques ni autoriser le retour complet des inspecteurs de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA).

Les diplomates à Vienne, eux, décrivent une situation inédite : le cœur du programme nucléaire iranien est partiellement paralysé, ses équipes scientifiques dispersées, et ses chaînes d'approvisionnement fortement entravées. Cinq mois après la guerre, une question s'impose : le programme nucléaire iranien est-il encore viable ou n'est-il plus qu'un vestige symbolique d'une ambition stratégique à bout de souffle ?

Vingt ans de tensions : du rêve d'atome civil à la quête du seuil nucléaire

Pour comprendre l'état du programme en 2025, il faut revenir deux décennies en arrière, au moment où le dossier nucléaire iranien entre sur la scène internationale.

Des débuts clandestins (2002 - 2006)

En 2002, le Conseil national de la résistance iranienne (CNRI), un mouvement d'opposition en exil, révèle l'existence de deux installations secrètes à Natanz et Arak. Ces sites, dédiés respectivement à l'enrichissement d'uranium et à la production d'eau lourde, violent les obligations de transparence imposées par le Traité de non-prolifération (TNP). Sous pression internationale, Téhéran accepte temporairement de suspendre ses activités et signe en 2003 un protocole additionnel avec l'AIEA. Mais cette trêve est de courte durée : en 2006, l'Iran relance l'enrichissement, invoquant son « droit inaliénable à la technologie nucléaire civile ».

L'ère des sanctions et des négociations (2007 - 2015)

Les Nations unies, les États-Unis et l'Union européenne imposent une série de sanctions économiques et financières sans précédent. En réponse, Téhéran durcit sa position et multiplie les centrifugeuses.

Entre 2009 et 2012, des cyberattaques, dont la célèbre opération Stuxnet, attribuée conjointement à Israël et aux États-Unis, endommagent plus d'un millier de centrifugeuses à Natanz.

Malgré ces revers, le régime des mollahs maintient le cap, renforcé par le Corps des Gardiens de la Révolution islamique (pasdaran), devenu le véritable maître d'œuvre du programme.

En 2013, l'élection d'Hassan Rohani, présenté comme un modéré, rouvre le dialogue avec l'Occident. Deux ans plus tard, le Plan d'action global conjoint (JCPOA) est signé à Vienne entre l'Iran, les cinq membres permanents du Conseil de sécurité et l'Allemagne (P5+1).

L'accord limite l'enrichissement à 3,67 %, réduit le stock d'uranium et prévoit des inspections renforcées de l'AIEA, en échange d'une levée progressive des sanctions.

Le tournant Trump et la fin de la confiance (2018 - 2020)

En mai 2018, Donald Trump annonce le retrait unilatéral des États-Unis du JCPOA, qualifiant l'accord de « désastre historique ». Les sanctions économiques sont rétablies et frappent le secteur pétrolier et financier iranien. Téhéran réagit graduellement : d'abord en dépassant les limites d'enrichissement, puis en restreignant l'accès des inspecteurs de l'AIEA.

De l'ambiguïté au seuil nucléaire (2021 - 2024)

Les années suivantes voient une montée continue de la tension. Sous la présidence d'Ebrahim Raïssi, l'Iran enrichit de l'uranium à 60 %, un niveau techniquement proche de la qualité militaire (90 %).

L'AIEA alerte à plusieurs reprises sur l'absence de coopération iranienne et la découverte de nouvelles centrifugeuses IR-9 plus performantes. En 2024, plusieurs rapports confidentiels font état de la constitution d'un stock d'uranium suffisant pour produire trois bombes de type Hiroshima si le régime franchissait le seuil militaire.

C'est dans ce climat de défiance et de crise que la guerre de juin 2025 éclate, à la suite de tests balistiques perçus par Israël comme une préparation à la militarisation du programme.

Juin 2025 : la guerre des douze jours et les frappes ciblées

Le 13 juin 2025, à l'aube, Israël lance l'Opération Rising Lion, une campagne de frappes surprises contre plusieurs installations stratégiques iraniennes. Les premières attaques visent Natanz, Ispahan et Parchin, provoquant une onde de choc politique et militaire à Téhéran.

Durant les premières 24 heures, le régime reste stupéfait et désorganisé : aucune riposte coordonnée n'est enregistrée, les systèmes de défense iraniens peinent à réagir. Ce n'est qu'à partir du lendemain soir que quelques missiles sol-sol sont tirés vers le sud d'Israël, sans effet majeur.

Pour la première fois depuis 1979, un affrontement direct et prolongé oppose Israël et le régime iranien, entraînant une inquiétude mondiale.

Les origines immédiates du conflit

Tout commence quelques jours plus tôt, avec la diffusion par les médias israéliens d'images satellites montrant des activités "anormales" à Natanz et à Fordow. Selon les services de renseignement israéliens (Mossad et Aman), l'Iran aurait franchi un seuil critique : la mise en service de nouvelles centrifugeuses IR-9 capables d'enrichir l'uranium à 90 %, soit la qualité militaire.

Le gouvernement israélien estime qu'un test nucléaire pourrait être imminent. Dans un discours prononcé à la Knesset, le Premier ministre affirme que « le monde se trouve à la veille d'un Iran nucléaire », et qu'il « ne restera pas inactif face à une menace existentielle ».

La doctrine israélienne, fondée sur la dissuasion préventive, ne laisse guère de place à l'attente.

L'intervention américaine

Les États-Unis n'interviennent qu'au neuvième jour du conflit, lorsque les tensions atteignent leur paroxysme. Le 22 juin 2025, l'administration américaine déclenche l'Opération Midnight Hammer, une campagne coordonnée de frappes aériennes contre les infrastructures nucléaires iraniennes.

Les bombardiers B-2 et B-52, appuyés par des missiles Tomahawk, ciblent Natanz, Fordow et Ispahan, infligeant les plus lourds dégâts jamais enregistrés sur ces sites.

L'opération, conduite sous autorisation directe du président Donald Trump, vise à "neutraliser définitivement les capacités d'enrichissement nucléaire de la République islamique".

Les rapports satellites publiés dans les jours suivants confirment la destruction quasi totale des salles souterraines de Natanz et de Fordow. Selon des sources militaires, ces frappes, coordonnées avec Israël, utilisaient des bombes anti-bunker GBU-57 capables de pénétrer jusqu'à 60 mètres sous terre.

Destruction et sidération

Les premières analyses satellitaires confirment l'ampleur des dégâts. À Natanz, le principal bâtiment d'enrichissement a été entièrement détruit. Les images montrent une large excavation à la place du complexe central. Les systèmes électriques et les conduites d'alimentation en gaz UF6 ont été soufflés.

À Fordow, les tunnels creusés dans la montagne sont partiellement effondrés. Plusieurs centaines de techniciens auraient été tués ou portés disparus selon des fuites internes à l'AIEA. Le choc est considérable. Jamais le cœur du programme nucléaire iranien n'avait subi une telle offensive coordonnée.

Dans un communiqué laconique, le ministère iranien des Affaires étrangères dénonce « un acte de guerre », mais évite d'annoncer une riposte immédiate. Les observateurs notent un changement notable dans la posture du régime : après quelques jours d'escalade verbale, le ton se fait plus mesuré.

Un cessez-le-feu imposé

Après douze jours d'un conflit d'une intensité inédite, un cessez-le-feu bilatéral est conclu le 24 juin 2025, sous médiation américano-qatarie. L'accord met fin à l'Opération Rising Lion, déclenchée par Israël le 13 juin, et à l'Opération Midnight Hammer menée par les États-Unis le 22 juin.

Contrairement à certaines versions relayées par la presse, ce cessez-le-feu n'a pas été imposé par la Russie ou la Chine, mais par la pression directe de Washington sur les deux parties.

Le président Donald Trump s'est personnellement entretenu avec les autorités qataries pour garantir la suspension des hostilités.

Sur le terrain, les conséquences sont lourdes : les infrastructures nucléaires iraniennes sont gravement endommagées, plusieurs hauts responsables militaires ont été tués ou portés disparus, et la chaîne de production d'uranium enrichi est totalement interrompue.

Si Téhéran proclame une "victoire de résistance", la réalité est tout autre : le régime sort affaibli, surpris et contraint au silence stratégique.

Conséquences politiques et scientifiques après la guerre (juillet– Novembre 2025)

Les répercussions de la guerre de douze jours se font sentir bien au-delà du champ de bataille. L'Iran émerge affaibli, tant sur le plan militaire que diplomatique, tandis qu'Israël et les États-Unis consolident une position de force inédite au Moyen-Orient.

1. Un choc stratégique pour Téhéran

La destruction quasi totale des sites de Natanz, Fordow et Ispahan a marqué la fin d'un cycle d'expansion nucléaire que le régime entretenait depuis deux décennies. Les images satellites publiées par Maxar Technologies et l'Institut pour la science et la sécurité internationale (ISIS) en juillet 2025 confirment que ces installations sont inopérantes : les halls souterrains de Natanz ont été soufflés, les tunnels de Fordow effondrés, et les réacteurs d'Ispahan rendus inutilisables.

Le Corps des Gardiens de la Révolution islamique (pasdaran) a tenté de disperser les équipes scientifiques vers des sites secondaires à Yazd et Kerman, mais les infrastructures locales ne permettent pas d'assurer une production stable. Ce déplacement traduit une retraite forcée plutôt qu'une adaptation stratégique.

2. L'arrêt des attaques de milices pro-iraniennes

L'un des effets les plus significatifs du conflit a été la suspension totale des attaques de milices irakiennes et syriennes contre les bases américaines.

Après la mort de trois soldats américains en Jordanie, les frappes américaines massives du 22 juin ont détruit une partie du commandement logistique reliant Téhéran à ses mandataires régionaux. Depuis juillet, aucune attaque directe n'a été revendiquée contre des cibles américaines au Moyen-Orient ; un changement majeur par rapport aux années précédentes.

Cette mise au pas des milices chiites témoigne d'un recalibrage de la politique iranienne : sous la pression combinée des pertes militaires et de la dissuasion américaine, le régime a choisi de ralentir temporairement sa projection régionale.

3. Un affaiblissement structurel du programme scientifique

L'Iran conserve un capital humain de grande valeur, mais les pertes humaines et techniques sont considérables. Plusieurs ingénieurs et cadres scientifiques liés à l'Organisation iranienne de l'énergie atomique (OIEA) ont péri dans les bombardements ou ont fui vers la Russie, la Chine et Oman.

Selon l'AIEA, près de 180 scientifiques auraient quitté le pays entre juillet et septembre 2025. Cette fuite des cerveaux compromet la reconstitution du savoir-faire nucléaire du pays.

L'université de Téhéran, l'Institut de Karaj et le centre de recherche d'Arak fonctionnent désormais à effectif réduit, tandis que les budgets de recherche sont passés sous le contrôle exclusif des pasdaran, qui privilégient les usages militaires à court terme.

4. Un isolement diplomatique accru

Sur la scène internationale, Téhéran se retrouve isolé comme rarement dans son histoire récente. La Russie et la Chine, bien qu'opposées à la stratégie américaine, ont adopté une attitude prudente : elles appellent à la stabilité régionale, mais refusent tout soutien logistique susceptible de violer les sanctions du Conseil de sécurité.

La Chine, soucieuse de préserver ses routes pétrolières, a même soutenu la médiation qatarie ayant conduit au cessez-le-feu du 24 juin.

Quant aux puissances européennes, elles se contentent d'appels au calme. L'Union européenne, fragilisée par ses divisions, n'a plus d'influence réelle sur le dossier nucléaire iranien.

5. L'effondrement du mythe de la « résistance »

La propagande du régime tente toujours de présenter la guerre de juin comme une "victoire morale", mais la population iranienne ne s'y trompe pas. Les pertes humaines, la flambée des prix et l'arrêt de nombreuses subventions ont accentué le mécontentement populaire. Dans plusieurs villes, des manifestations dénoncent "une guerre inutile" et la "folie nucléaire du régime".

Le programme atomique, longtemps brandi comme symbole de souveraineté, est désormais perçu par une large partie de la société comme une cause de ruine nationale. Cette évolution du sentiment public affaiblit le pouvoir des pasdaran, de plus en plus accusés d'avoir conduit le pays à l'impasse.

L'état actuel du programme nucléaire (Novembre 2025)[1]

Cinq mois après les frappes israélo-américaines, le programme nucléaire iranien existe encore, mais sous une forme éclatée. L'appareil industriel a été gravement endommagé, les chaînes logistiques perturbées et la majorité des infrastructures souterraines inutilisables.

1. Un programme réduit à l'état résiduel

Quatre mois après la guerre de juin 2025, le programme nucléaire iranien ne fonctionne plus qu'à capacité minimale. Les sites de Natanz, Fordow et Ispahan, jadis au cœur de l'enrichissement, sont hors service.

Les dégâts structurels, notamment l'effondrement des tunnels et la destruction des conduites d'alimentation en gaz UF6, rendent toute reprise industrielle impossible à court terme. Les nouvelles installations souterraines en construction dans le Khorasan et autour de Yazd ne sont qu'à un stade embryonnaire.

elon un rapport confidentiel de l'AIEA daté du 2 octobre 2025, l'Iran conserve près de 440 kilogrammes d'uranium enrichi à 60 %, contre environ 274 kg en février. Cette augmentation, malgré les frappes ciblées et les perturbations liées au conflit, démontre la résilience et la continuité du programme nucléaire iranien. Loin d'un affaiblissement, ces chiffres traduisent une capacité technique intacte et une stratégie assumée pour maintenir un seuil d'enrichissement élevé.

Les activités actuelles se limitent à des travaux de recherche universitaire et de maintenance sur les centrifugeuses IR-4, sans production industrielle.

2. Militarisation du contrôle et fin de l'autonomie scientifique

Depuis juillet, la supervision du programme a été totalement militarisée. Le Département des projets spéciaux (SPND) du Corps des Gardiens de la Révolution islamique (pasdaran) contrôle désormais tous les budgets, les affectations de personnel et les importations clandestines. Les civils de l'Organisation iranienne de l'énergie atomique (OIEA) sont cantonnés à des fonctions de façade.

Plusieurs arrestations ont été signalées à Téhéran et à Qom, notamment parmi des chercheurs accusés de "négligence" ou de "collaboration étrangère". Selon des témoignages recueillis par Radio Farda, les scientifiques sont désormais surveillés en permanence par des agents des pasdaran, ce qui étouffe toute initiative académique.

Cette dérive sécuritaire traduit une peur profonde : celle d'une infiltration occidentale et d'une nouvelle vague d'assassinats ciblés semblable à celle des années 2010.

3. Une perte de crédibilité internationale

Sur la scène mondiale, le capital diplomatique iranien est à son plus bas niveau depuis 2015. Les alliés traditionnels du régime adoptent un ton prudent :

  • La Chine, soucieuse de préserver ses routes pétrolières, maintient une distance stratégique et encourage la désescalade.
  • La Russie, absorbée par son propre isolement, limite son soutien à des gestes symboliques.
  • Les pays arabes du Golfe, rassurés par la démonstration de force israélo-américaine, durcissent leurs alliances sécuritaires avec Washington.

Dans ce contexte, l'Iran se retrouve isolé, économiquement étranglé, et diplomatiquement marginalisé.

L'AIEA, bien que tolérée sur certains sites secondaires, n'a plus d'accès complet au territoire, et son directeur général Rafael Grossi admet "une perte critique de visibilité sur les activités réelles du pays".

4. Quatre scénarios d'évolution

a) Le scénario du repli stratégique

L'hypothèse la plus probable reste celle d'un repli prolongé. Téhéran maintiendrait une base scientifique minimale, sans enrichissement significatif, dans l'espoir d'obtenir ultérieurement un allègement des sanctions. Ce choix préserverait les apparences de souveraineté tout en évitant une nouvelle confrontation militaire.

Mais cette "patience stratégique" repose sur une condition : que le régime conserve une stabilité interne suffisante pour financer la survie de ses laboratoires.

b) Le scénario de la reconstruction clandestine

Des factions affiliées aux pasdaran plaident pour une reconstruction discrète du programme, fondée sur la dispersion des sites et la miniaturisation des équipements.

Ce modèle s'inspire du système nord-coréen, où les activités sont fragmentées en micro-structures invisibles aux satellites. Des transferts suspects d'équipements depuis le port de Bandar Abbas ont déjà été observés par les services israéliens.

Toutefois, les réseaux logistiques de contrebande sont aujourd'hui fragilisés : les sanctions sur les métaux rares, les roulements à billes et les semi-conducteurs ont coupé l'Iran de ses fournisseurs chinois et malaisiens. Une reprise clandestine reste donc hautement risquée et techniquement limitée.

c) Le scénario diplomatique

Certains diplomates iraniens plaident pour une nouvelle négociation sous parrainage qatari ou omanais, avec un "accord de suspension tacite". L'idée serait de geler l'enrichissement au-delà de 20 % en échange d'un allègement partiel des sanctions sur les exportations de pétrole.

Mais cette option se heurte à la méfiance du régime : depuis le retrait américain du JCPOA en 2018, Khamenei refuse toute concession perçue comme un signe de faiblesse.

La position américaine reste ferme : selon le site officiel de la Maison-Blanche (22 juin 2025), Donald Trump déclarait : "Nous ne voulons pas la guerre avec l'Iran. Nous voulons en réalité la paix, mais une paix dans le contexte où ils n'ont pas de programme d'armes nucléaires."

Ce cadre de négociation exclut toute légitimité au programme nucléaire militaire, même sous supervision internationale.

d) Le scénario du basculement interne

Le plus incertain, mais aussi le plus déterminant, est celui d'une crise interne majeure. Si le régime devait être ébranlé par de nouvelles émeutes sociales, un affaiblissement du Guide suprême ou des divisions au sein des pasdaran, le programme nucléaire pourrait s'effondrer avec lui. Comme le soulignait Sanam Vakil (Chatham House, octobre 2025), "Le destin du nucléaire iranien dépend moins des centrifugeuses que de la solidité du régime. Si Téhéran vacille, l'atome suivra."

5. Entre survie et résignation

Aujourd'hui, le programme nucléaire iranien n'est plus un projet de puissance, mais un instrument de survie politique. La guerre de juin a brisé son ossature technique, et la dissuasion régionale a changé de camp.

Les ambitions nucléaires ne sont pas abandonnées, mais placées en sommeil, suspendues aux décisions d'un pouvoir vieillissant et isolé. Tant que le régime restera fondé sur la défiance et la peur, aucune reprise durable ne sera possible.

Le nucléaire iranien, jadis symbole de résistance, risque de devenir le vestige d'une époque où Téhéran croyait encore pouvoir défier le monde.

Conclusion

cinq mois après la guerre de juin 2025, l'Iran fait face à un paradoxe stratégique. Son programme nucléaire n'a pas disparu, mais il a perdu l'essentiel : sa capacité industrielle, sa crédibilité diplomatique et sa valeur dissuasive.

Les frappes israélo-américaines ont réduit en quelques jours ce que deux décennies de développement avaient construit, reléguant l'atome iranien au rang d'outil symbolique au service d'un pouvoir fragilisé.

Le régime, désormais isolé, oscille entre deux choix : poursuivre une résistance de façade ou accepter une pause tactique pour préserver son autorité intérieure. Le premier risque de le conduire à une impasse ; le second, à une lente érosion de son influence régionale.

Le Guide suprême et les Gardiens de la Révolution conservent encore le pouvoir de décision, mais leurs marges de manœuvre se réduisent sous la pression des sanctions, des tensions sociales et des revers militaires.

Au-delà des installations détruites, c'est le mythe de la puissance nucléaire iranienne qui s'effrite. Le pays conserve le savoir-faire, mais non la stabilité politique nécessaire pour en faire un levier stratégique.

La survie du programme dépendra moins de la science que de la politique : du degré de cohésion du régime, de sa capacité à négocier, et de l'attitude des grandes puissances face à son affaiblissement.

Dans ce nouveau paysage, le nucléaire iranien n'incarne plus la montée en puissance d'une nation, mais la trace d'un système en déclin, cherchant encore dans l'atome une légitimité qu'il n'a plus sur le plan intérieur. L'avenir du dossier dépendra de la réponse à une seule question : Téhéran choisira-t-il la survie ou la confrontation ?

* Maceo Ouitana est journaliste et collaborateur de la FEMO

commencer ici